Programme de la Journée d’étude “Les objets (in)tangibles : enjeux et pratiques autour de la matérialité et de l’immatérialité en art”
En l’abordant sous différents angles – artistique, muséologique, anthropologique, l’objet de cette journée d’étude sera d’interroger des formes de représentation et de transmission d’une oeuvre ou d’un bien culturel, exploitant les tensions entre la matérialité et l’immatérialité, le visible et l’invisible ou encore la réalité et la fiction. Pensée comme un espace de réflexion et d’échanges, cette journée s’adresse aux étudiants en art, artistes, théoriciens et professeurs.
• 8h45 Accueil
• 9h15 Noémie Drouguet (ESA Saint-Luc Liège/ ULiège), « L’objet qui parle. De la parole du collectionneur à celle des artistes : retour sur un projet de recherche en art à l’ESA Saint-Luc
Liège »
Si un collectionneur se raconte à travers sa collection, comment donner forme à ses propos au-delà de la présentation des objets matériels ? Que peuvent à leur tour exprimer de jeunes artistes, designers, créateurs et conservateurs-restaurateurs au départ de ces témoignages du passé ? La collection de design de Philippe Diricq, désormais patrimonialisée, est exploitée de diverses manières depuis trois ans au sein de l’Ecole supérieure des Arts Saint-Luc Liège, dans l’optique de développer les compétences en recherche. La communication présentera quelques-unes des réflexions les plus originales menées à partir d’une collection parfaitement tangible, s’offrant à la manipulation : la fonctionnalité des objets comme performance, la multisensorialité comme moteur de mise en récit, l’authenticité comme prétexte à la réinterprétation.
• 10h Kim Cappart (artiste), « Une bouteille à la mer »
Formée en scénographie, Kim Cappart est une artiste engagée qui s’intéresse particulièrement au rôle sociétal des musées. Depuis 2018, à l’issue de son mémoire de master intitulé « Comment la scénographie d’exposition peut aider à sensibiliser les publics sur des problématiques contemporaines dans un musée de société ? », elle développe une recherche entre théorie et pratique autour de la notion de scénographe-auteure. En quête d’équilibre entre réflexion et action directe, entre productions personnelles et projets participatifs, Kim vise à questionner le présent en utilisant les collections muséales comme prétexte d’exploration pour la conception d’installations évolutives, interactives, peut-être immersives et parlantes. Sa résidence à l’Émulation dans le cadre du Forum Sans Transition ! est une continuation de son travail entamé en 2021 à l’ESA St-Luc Liège grâce à la bourse Un futur pour la culture de la Fédération Wallonie-Bruxelles, où elle a pu présenter une première expression artistique libre issue de cette recherche autour de L’objet qui parle. Très sensible aux problématiques environnementales, Kim a profité de la collection de Philippe Diricq pour investiguer sur le rapport entre possession d’objets et (sur)consommation, et plus précisément à travers l’observation de deux formes extrêmes de ce rapport : l’oniomanie (ou la « maladie » d’achats compulsifs) et la syllogomanie (ou la « maladie » d’accumulation de toutes choses). Une bouteille à la mer est la matérialisation d’un dilemme, un paradoxe, une illusion. À travers cette installation, le visiteur passe par une forme « d’implication involontaire », terme auquel Kim pense en contraste avec d’autres idées muséologiques actuelles, comme la participation citoyenne ou la co-création.
• 10h45 Pause-café
• 11h Manuelina Duarte (ULiège), « Les sens, les temps et les destins des choses »
Cette intervention présentera le projet de recherche “Les sens, les temps et les destins des choses”, ses prémisses plus générales et son intérêt autour de l’incendie du Musée national de Rio de Janeiro en 2018.
• 12h Déjeuner au Théâtre de Liège et visite à l’exposition L’
objet qui parle
(le déjeuner est offert)
• 14h Carolina Bonfim (artiste), « La dernière archive. Performer le patrimoine disparu du Musée National de Rio de Janeiro ».
Le 2 septembre 2018, un incendie a ravagé le Musée national de Rio de Janeiro et a réduit en
cendres près de 90% de son patrimoine de plus de 20 millions d’objets parmi lesquels figurait
une des plus importantes collections d’objets indigènes au monde, ainsi que des artéfacts historiques des cultures afro-brésiliennes et du Pacifique, des reliques égyptiennes et des oeuvres d’art gréco-romaines. Face à cette catastrophe, je me suis interrogée : Comment une personne qui n’est jamais allée dans ce musée – comme c’est mon cas – pourrait accéder à un patrimoine qui n’existe plus ? Pour répondre à cette question, j’ai interviewé des personnes en leur demandant de me transmettre un objet du musée qui, pour une raison ou une autre, a de l’importance pour eux. Le résultat artistique de cette recherche est la performance La dernière archive. Performer le patrimoine disparu du Musée national de Rio de Janeiro. La journée d’étude sera l’occasion de partager le processus de création et, aussi, d’aborder des sujets liés au patrimoine immatériel, à la mémoire corporelle et à la transmission par le corps.
• 14h45 Rodrigo Andreolli (artiste), « Objet prismatique – tisser des souvenirs numériques, virtuels et sociaux avec des choses »
Comment pouvons-nous proposer des gestes qui soutiennent un espace génératif où de multiples récits peuvent coexister de manière dynamique ? Comment l’exercice de la présence entre corps et objets, entre entités visibles et invisibles, peut-il être une manière de tisser des archives et des mémoires vivantes ? À partir de mes travaux récents et des pratiques que je développe autour d’eux, je souhaite réfléchir aux transits entre mémoire et virtualité et aux possibilités de construire des mondes au carrefour de la haute et de la basse technologie.
• 15h15 Pause-café
• 15h30 Béatrice Josse (curatrice), « Oeuvrer avec l’incertitude »
Évincées de l’histoire de l’art académique, la performance tout comme les autres formes d’oeuvres protocolaires ou collectives n’ont guère eu de place dans les collections muséales, focalisées sur les aspects matériels des oeuvres. Alors que la notion de patrimoine immatériel s’officialise via l’Unesco à la fin des années 90, j’intègre des oeuvres performatives, souvent conjuguées au féminin, au Fonds régional d’art contemporain de Lorraine basé à Metz. Il constitue ainsi la première collection publique en France à entériner cette forme d’acquisitions de formes live à réactiver, à interpréter. Animée par une démarche profondément féministe qui permet de révéler les questions d’invisibilité au sens large, je poursuis la démarche de déconstruction des valeurs instituées d’un certain monde de l’art arcbouté sur des valeurs marchandes.
• 16h15 Conclusion de la journée Guy Massart (anthropologue, LASC/ULiège)